Ergonomie travail au froid

Travail dans le froid : comment l’ergonomie peut vous aider ?

J’ai l’habitude de débuter ma journée en interrogeant ma météo intérieure.

Or, je dois être sincère avec vous : j’ai une fâcheuse tendance à calquer ma météo intérieure sur la météo extérieure.

C’est donc tout naturellement que je voulais évoquer avec vous le travail au froid.

Soyons clair : en ergonomie, on appelle ambiance froide dès que les températures descendent en dessous de 5°C.

Et pendant la période hivernale, cela concerne majoritairement les personnes qui travaillent en extérieur. Là où le risque est accentué par une exposition aux intempéries, au vent, à l’humidité. Cela implique notamment les travailleurs du BTP, des voiries, du secteur du transport, les ouvriers agricoles.

Travailleurs du BTP exposés au froid

Mais n’oublions pas non plus toutes les personnes exposées toute l’année en froid artificiel. Il s’agit principalement des chambres froides de l’industrie alimentaire, où l’exposition au froid peut s’avérer très importante (-25°) 🥶

Travailleur en chambre froide
Travailleur en chambre froide

Or le froid peut être un ennemi redoutable pour ceux qui passent de longues heures à l’extérieur ou dans des environnements refroidis. Il peut affecter la santé et la sécurité des travailleurs, ainsi que leur performance.

Nous allons donc explorer ensemble les risques qui existent à travailler dans le froid. Sachant que ces risques dépendent :

  • de l’intensité du froid,
  • du type de travail effectué,
  • et surtout des moyens de protection.

Car heureusement, l’ergonomie peut aider à atténuer les effets négatifs du froid sur les travailleurs.

Travail au froid : les impacts sur la santé, la sécurité et la performance

Le froid peut avoir un impact significatif sur la santé et la performance des travailleurs qui exercent leur activité dans des environnements froids, tels que les usines frigorifiques, les chaînes de montage de produits congelés, les camions de livraison, etc.

Pour prévenir les impacts négatifs du froid sur les travailleurs, il convient de comprendre les risques associés au travail au froid et les mesures à mettre en place pour les prévenir.

Les impacts du froid sur la santé

Lorsque l’on expose notre corps à des températures froides, nous mobilisons beaucoup d’énergie, de ressources.

Le refroidissement de tout ou partie du corps peut provoquer de nombreuses blessures dues au froid. Cela peut se traduire par des gelures ou des engelures. Cela peut également aller jusqu’à l’hypothermie, beaucoup plus grave.

Les extrémités, c’est-à-dire le nez, les oreilles, les doigts et les orteils sont les parties du corps les plus à risque. Pourquoi ? Car lorsqu’il fait froid, la circulation sanguine se concentre au niveau des organes internes (le cœur, les poumons, les organes digestifs) pour les protéger. L’afflux sanguin, responsable de la production de chaleur, est donc moindre en périphérie, a fortiori au niveau des extrémités.

Impact du travail au froid sur les doigts
Impact du travail au froid sur les doigts

En cas de gelures ou d’engelures au niveau des doigts ou des orteils. Ils deviennent rouge violacés, douloureux, avec parfois des crevasses. La gravité de ces lésions cutanées varie selon le niveau d’exposition au froid, qui dépend à la fois du temps d’exposition et de l’intensité du froid. Dans les cas les plus graves plus graves (expositions prolongées à de très basses températures), les séquelles peuvent être très douloureuses voire permanentes (dans le cas de nécroses profondes de tissus).

Le froid peut avoir un impact sur la santé en provoquant d’autres symptômes tels que des engourdissements, des crampes, ou des maux de tête. Par ailleurs, le froid peut augmenter les risques de troubles musculosquelettiques (TMS), tels que des douleurs musculaires, des douleurs articulaires et des tensions, en raison de la contraction des muscles pour maintenir la chaleur corporelle.

L’hypothermie constitue la pathologie due au froid la plus grave. Elle résulte d’un refroidissement important de la température centrale du corps qui passe en dessous de 35 °C. L’hypothermie peut être fatale.  Les principaux signes qui doivent alerter sont des frissons, une atonie (manque d’énergie), des signes cutanés (peau froide) et neurosensoriels (désorientation, confusion, voire perte de conscience).

Les impacts du froid sur la sécurité

On sait que le froid peut générer du stress et de la fatigue. On observe également une baisse de la vigilance, de la capacité d’exécution de tâches mentales complexes, ce qui peut entraîner une augmentation des risques d’accidents du travail.

Et en cas de températures inférieures à 0°C, des glissades et des chutes sur du verglas ou de la neige peuvent survenir. Bref, tout cela peut augmenter les risques d’accidents du travail.

Le travail au froid et les risques de glissade sur du verglas
Travail au froid – Risque de glissade sur du verglas

Les impacts du froid sur la performance

Le froid peut également avoir un impact sur la performance. En lien avec la diminution de la dextérité due au refroidissement et à l’engourdissement des doigts ou à l’utilisation des gants, le froid peut générer une diminution des performances musculaires et de la capacité d’exécution de tâches physiques.

De plus, en réduisant la rapidité et la précision des mouvements, il peut entraîner une augmentation des erreurs et une réduction de la qualité du travail.

Enfin, le confort thermique a des répercussions aussi bien sur le bien-être d’un travailleur que sur sa productivité. En effet, selon une étude réalisée par l’Université de Cornell, le froid peut engendrer une hausse de 10% du coût horaire du travail. Dans un environnement de travail trop froid, les salariés sont trop occupés à se réchauffer. Ils se déconcentrent et perdent en efficacité.

le travail au froid diminue la capacité de concentration
Travailler au froid diminue la capacité de concentration

Comment prévenir les impacts négatifs du froid ?

Obligations de l’employeur

En tant qu’employeur, vous êtes tenu de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (article L. 4121-1 du Code du travail), en application des principes généraux de prévention du Code du travail.
Bien que ce dernier ne stipule pas d’indication de température minimale, l’employeur doit :

  • prendre en compte les conditions de température lors de la rédaction du Document Unique d’Evaluation des Risques.
  • mettre en place des mesures de prévention appropriées.
  • aménager les situations de travail à l’extérieur de manière à assurer, dans la mesure du possible, la protection des travailleurs contre les conditions atmosphériques (article R. 4225-1 du Code du travail).
  • veiller à ce que les locaux fermés affectés au travail soient chauffés pendant la saison froide. Le chauffage doit être assuré de telle façon qu’il maintienne une température convenable et qu’il ne donne lieu à aucune émanation délétère (article R. 4223-13 du Code du travail)

Quelques recommandations de prévention collective

  • Mettre à disposition un local chauffé offrant la possibilité de consommer des boissons chaudes.
  • Proposer des moyens pour sécher des vêtements ou stocker des vêtements de rechange.
  • Mettre à disposition des dispositifs localisés de chauffage par rayonnement pour les postes particulièrement exposés.
  • Apposer un panneau d’avertissement « Basse température » ainsi qu’une signalisation spécifique (entrée dans une zone de froid extrême, contact possible avec des surfaces froides, présence de surfaces glissantes…).
  • Recouvrir les poignées et les barres métalliques d’un matériau isolant.
  • Fournir des aides à la manutention manuelle pour réduire la charge physique de travail et la transpiration.
  • Limiter voire supprimer les courants d’air (vitesse de l’air max : 0,20 mètre/seconde).

Pour prévenir les risques pour la santé liés au travail au froid, il existe d’autres mesures ergonomiques pour améliorer les conditions de travail des employés. Voici quelques conseils pour vous aider :

Équipement de protection

Il est important de fournir à chaque travailleur des vêtements de protection adaptés pour les protéger contre le froid. Cela peut inclure des vestes, des gants, des bonnets, des bottes, pour protéger les extrémités et la tête.

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Les vêtements de protection doivent être suffisamment chauds et isolants pour protéger les travailleurs contre le froid. Mais ils doivent être suffisamment légers pour ne pas limiter les mouvements et permettre une bonne circulation sanguine.

A titre individuel, il est indispensable de s’équiper efficacement.

Vêtements

Pour être en état de confort thermique, il convient de porter une quantité raisonnable de vêtements. Il s’agit d’avoir ni trop chaud ni trop froid.

De plus, vos vêtements doivent être adaptés à votre activité et ne pas vous gêner. Si vous devez travailler avec des gants, vous ne devez pas ressentir le besoin de les retirer pour faire correctement ou plus efficacement votre activité. Evitez de manipuler des produits froids à mains nues surtout si leur température est négative.

Il est dorénavant bien connu qu’il vaut mieux porter plusieurs couches de vêtements, qu’une seule très épaisse. La multiplication des couches permet d’emprisonner l’air chaud au contact de votre corps qui se trouve entre les couches de vêtements. Cela assure une meilleure protection que le vêtement lui-même. A l’idéal, la tenue vestimentaire la plus efficace est composée de trois couches :

  • la couche interne : les sous-vêtements. Isolante, elle doit éviter l’humidité de la peau pour la conserver sèche. Privilégiez les matières synthétiques, de type polyester ou polypropylène.
  • la couche moyenne : le pull et le pantalon. Evitez le coton qui a tendance à garder l’humidité et à perdre ses propriétés isolantes. Privilégiez plutôt la laine et là encore les fibres synthétiques qui retiennent la chaleur même humides.
  • la couche externe : le vêtement spécialisé isotherme (parka, anorak, pantalon imperméables)
Protection de la tête

C’est par la tête que s’évacue la majeure partie de la chaleur. Il convient donc de la protéger efficacement. Le port d’un bonnet ou d’un casque de sécurité avec doublure isolante permet d’empêcher la déperdition de chaleur.

Gants

Il faut porter des gants si la température ambiante est au-dessous de 4°C, pour le travail léger, et au-dessous de -7°C, pour le travail modéré.

Chaussures – Chaussettes

Vos chaussures doivent être suffisamment grandes pour contenir une paire de chaussettes épaisses ou deux paires de chaussettes minces. Les chaussettes en polypropylène aident à conserver les pieds secs et chauds en évitant la sueur à la surface de la peau.

Chaussures ergonomiques adaptées pour prévenir les impacts du froid au travail
Chaussures adaptées contre le froid

Amélioration de l’environnement de travail

Cela consiste à fournir un revêtement de sol isolant, ou à installer des radiateurs et des ventilateurs pour améliorer la circulation d’air dans les zones de travail.

De plus, l’installation de bâches, de rideaux d’air chaud ou d’écrans déflecteurs permet de supprimer les courants d’air ou des entrées d’air froid, selon la configuration. Il peut également être utile de créer des zones tampons. C’est le cas par exemple des quais de déchargement de marchandises ou à l’entrée de grandes surfaces commerciales qui sont munies souvent de sas ou portes automatiques.

Enfin, le phénomène de condensation créée en cas de choc thermique est à proscrire. Il convient de choisir pour les sols des matériaux supprimant le risque de glissade.

Aménagement du poste de travail

Il convient d’éviter les positions statiques et d’encourager la mobilité. Par ailleurs, une bonne posture permet de réduire les contractions musculaires et articulaires, accentuées par le froid. Pour cela, il apparait essentiel de veiller à ce que les employés ne soient pas contraints de se pencher en avant ou de se tenir dans des positions inconfortables pendant de longues périodes de temps.

Alternance des activités

Lorsqu’il est possible, il est important d’alterner les activités pour permettre aux travailleurs de se réchauffer et de se reposer. Par exemple, les travailleurs peuvent effectuer une tâche à l’intérieur pendant un certain temps, puis une autre tâche à l’extérieur. Cela peut aider à réguler la température du corps et à prévenir les risques pour la santé liés au froid.

L’instauration de pauses régulières permet aux employés de se reposer et de récupérer de l’exposition au froid.

Formation – Information

La formation des travailleurs sur les bonnes pratiques pour travailler au froid s’avère également importante. Cela peut inclure des informations sur les dangers du froid, les signes d’alerte et les symptômes ainsi que sur les mesures à prendre en cas d’urgence.

Des conseils sur une alimentation adaptée (sucres lents, soupes) et une hydratation à l’aide de boissons chaudes peuvent être prodigués. De plus, un rappel concernant l’interdiction de l’alcool, qui rappelons-le, ne réchauffe pas se révèle toujours utile !

Et si je travaille à des températures comprises entre 5°C et 15 °C ?

Entre 5 et 15°C, un inconfort peut survenir, qu’il convient de considérer selon la nature du travail réalisé.

En effet, à ces températures, il existe moins de risques directs. Toutefois elles peuvent se révéler sources d’inconfort pour des travaux sédentaires ou de pénibilité légère. On peut alors observer des frissons, des engourdissements voire des rhumes.

Les risques indirects sont des accidents dus à une pénibilité et une fatigue accrues, à une perte de dextérité, une survenue de TMS au niveau de la nuque. Ils sont souvent générés par une crispation des trapèzes. En effet, on remonte légèrement les épaules vers les oreilles afin de couvrir nos thermorécepteurs situés au niveau du cou.

Et si je travaille dans un bureau ?

Nous ne sommes en effet pas tous égaux face au froid. D’ailleurs, qui n’a pas bataillé dans un bureau partagé ou même chez soi sur le réglage de la température ?

Pour maintenir un vrai confort thermique dans un bureau, il convient de maintenir une température stable entre 19°C et 24°C. Evitez les élévations exagérées de température en réaction à la météo extérieure. Un écart par rapport à la zone de confort, si petit soit-il, peut être une source de stress.

Par ailleurs, le taux d’humidité doit être compris entre 30% et 60% avec un système de ventilation efficace. 

En intérieur comme en extérieur, il n’est pas nécessaire de porter des vêtements trop épais, au risque de se retrouver engoncé. Veillez à préserver la chaleur dégagée naturellement par votre corps et emprisonnée entre la peau et le vêtement. Pour cela, privilégiez le nombre de couches et évitez de laisser des parties du corps à nu.

Au bureau, l’hydratation constitue une manière très efficace de lutter contre le froid. Boire des boissons chaudes telles que le café, la tisane ou le chocolat chaud s’avèrent de bons alliés pour faire face au froid.

Enfin, lors des pauses, et si votre lieu de travail le permet bien sûr, n’hésitez pas à pratiquer une activité physique. Paradoxalement, aller marcher dans le froid est souvent une excellente façon de se réchauffer. Toutefois, vous pouvez également monter quelques escaliers ou pratiquer des étirements.

Si vous êtes en télétravail, profitez de la pause déjeuner pour bouger de quelque manière que ce soit. Personnellement, je déteste le repassage. Néanmoins, lorsqu’il fait froid, c’est bien la seule période où j’apprécie le contact avec ma centrale vapeur !

Conclusion

En conclusion, nous avons vu que le froid peut avoir des conséquences non négligeables sur la santé et la sécurité des travailleurs. Mais heureusement l’ergonomie peut aider à atténuer ces effets. En veillant aux bonnes conditions de travail des salariés, il est possible d’en limiter voire d’en supprimer les conséquences. En effet, s’habiller adéquatement, aménager le poste et l’environnement de travail, alterner les activités et former les travailleurs constituent autant de mesures de prévention à diffuser largement.

Je vous remercie d’avoir lu cet article. J’attends vos commentaires avec impatience. N’hésitez pas à me faire part de vos solutions pour lutter contre le froid au travail. Ca m’intéresse.

Je vous dis à bientôt pour un prochain article sur les thèmes de l’ergonomie. 👋

Si vous avez aimé l'article, vous êtes libre de le partager ! ;-)

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Mélanie Brout - Ergonome
Mélanie Brout