femme assise à son bureau et qui dort sur ses livres

Comment votre sommeil influe-t-il sur votre productivité au travail ?

« Arrête de réviser et va dormir ! » me disait ma mère avant de passer un examen.

C’est dorénavant à mon fils ainé de passer les épreuves de spécialités du bac et je m’entends lui répéter la même phrase.

En effet, les recherches (ainsi que le bon sens de nos parents et de nos grands-parents avant eux) prouvent qu’un sommeil optimal joue un rôle essentiel sur notre façon de travailler et de performer.

Une bonne nuit de sommeil est étroitement liée à notre productivité au travail. C’est-à-dire notre capacité à réaliser nos tâches et à mettre en œuvre des méthodes pour réussir nos objectifs.

Or les Français dorment en moyenne 1h30 de moins qu’il y a 50 ans…

Et nous l’avons tous expérimenté : privés de sommeil, nous rencontrons des difficultés à nous concentrer, à mémoriser. Nos temps de réaction augmentent. Notre humeur est affectée, et à terme c’est notre santé physique qui peut être altérée.

Nous allons voir tout cela plus en détails.

Quels sont les mécanismes du sommeil ?

« Le sommeil est la moitié de la santé. »

Proverbe breton

Nous passons plus d’un tiers de notre existence à dormir, puisque la durée optimale d’une nuit de sommeil est d’en moyenne 8 heures.

On comprend donc aisément le rôle capital que joue le sommeil dans notre vie.

Le sommeil de l’adulte se compose en une succession de trois phases :

  • Le sommeil lent léger représente environ 50 % du temps de sommeil total. Durant ce stade, le réveil est facile. On parle aussi de somnolence.
  • Le sommeil lent profond représente à l’idéal 20% du temps de sommeil total (soit environ 1h40 pour un sommeil de 8h). Au cours de cette phase, votre corps se regénère des efforts physiques effectués au cours de la journée. Vous rechargez vos batteries. Quand il est de qualité, on parle de sommeil réparateur. Les muscles sont au repos et l’activité cérébrale se réduit. Il est reconnu que cette phase est plus bénéfique lorsqu’elle se produit avant minuit. Durant cette phase, le réveil est plus difficile.
  • Le sommeil paradoxal est une phase au cours de laquelle le sommeil est très profond, nos muscles sont complètement paralysés. Et pourtant, paradoxalement, le dormeur présente des signes d’éveil : l’activité cérébrale est très intense, les yeux sous les paupières sont agités (REM : Rapide Eye Movements). Ce sommeil réparateur permet à notre cerveau d’éliminer les déchets accumulés dans la journée, afin de favoriser la régénération des cellules. Cela a pour effet de booster nos facultés cérébrales et de réorganiser nos connexions neuronales.

Les conséquences sur votre productivité sont alors nombreuses.

Le rôle du sommeil dans les mécanismes cognitifs

« On ne dort pas pour dormir, mais pour agir. »

Georg Christoph Lichtenberg

Se concentrer 

Nous l’avons vu, le cerveau est le premier bénéficiaire d’un sommeil de qualité. Un sommeil réparateur lui permet de mieux se concentrer, de réfléchir posément et de prendre des décisions adaptées. Bien reposé, nos capacités de raisonnement sont renforcées, et vous arrivons à résoudre plus facilement les problèmes qui se présentent à nous.

« Les nuits sont faites pour qu’on puisse rejouer les choses. »

Madeleine Chapsal

Mémoriser et apprendre

Pendant le sommeil, le cerveau stocke les informations de la journée, les classe, fait de la place pour enregistrer de nouvelles données, et par conséquent améliore nos capacités de mémorisation. Bénéficiant d’une meilleure concentration et d’une meilleure mémoire, notre cerveau apprend mieux en intégrant efficacement de nouvelles connaissances. D’ailleurs, des études utilisant l’imagerie cérébrale montrent bien que l’on rejoue pendant le sommeil ce que l’on a vécu pendant la journée

Si certains pensent que le pouvoir du sommeil est tel qu’il suffit de glisser un livre sous l’oreiller pour s’en imprégner, il est surtout essentiel de dormir à des heures régulières et de profiter d’une bonne nuit de sommeil.

« Le sommeil du corps permet l’éveil de l’âme. »

Thomas Brown

Créer

S’inspirant de l’effet « Eurêka » de Thomas Edison et Salvador Dalí, convaincus que l’endormissement était propice à la créativité, des chercheurs français ont proposé à 103 participants de résoudre des problèmes de mathématiques, tous résolvables presque instantanément grâce à une même règle, bien sûr inconnue des participants au début du test. Les sujets essayaient de résoudre les problèmes une première fois. Tous ceux qui n’avaient pas trouvé la règle cachée étaient invités à faire une sieste d’une vingtaine de minutes, avant de repasser les tests mathématiques. Toutefois, les participants tenaient une bouteille en plastique dans la main, afin que la chute de l’objet les réveille avant qu’ils ne s’endorment trop profondément. Les résultats montrent que ceux ayant somnolé au moins 15 secondes, ont vu leur chance triplée de trouver la règle cachée. Cependant, cet effet disparait si les sujets s’endorment trop profondément. Ces « siestes créatives » un objet à la main serait donc un moyen facile et accessible pour stimuler notre créativité dans la vie de tous les jours.

Les conséquences d’un sommeil dégradé

Vous travaillez avec acharnement sans toutefois observer d’amélioration notable de vos performances ? C’est peut-être dû à un manque de sommeil. Travailler toute la nuit pour arriver fatigué le lendemain matin au travail ne vous rendra pas plus productif.

Et les conséquences du manque de sommeil sont nombreuses.

Vous êtes moins attentif

Vous en avez certainement déjà fait l’expérience : sans une bonne nuit de sommeil, notre concentration n’est pas au rendez-vous. Difficile de bien traiter les informations quand on manque de sommeil. Par conséquent, bien dormir évite les baisses de vigilance et la diminution des capacités d’apprentissage, de réflexion. Bref, les pertes de temps.

La privation de sommeil est donc tout simplement contre-productive.

Vous êtes davantage irritable

Ce collègue bavard vous agace plus que d’habitude ? Vous ne supportez plus le temps que met votre ordinateur à s’allumer ? Vous vous énervez plus facilement, vous manquez de patience, et vous vous laissez rapidement envahir par le stress. Et les relations avec vos collègues ou votre hiérarchie en pâtissent.

Un déficit de sommeil a un impact sur l’irritabilité et l’émotivité. Une étude menée par les universités de Berkeley et Harvard a établi que la fatigue rendait plus difficile le contrôle de nos émotions, notamment les manifestations d’amitié et d’empathie.

Vous êtes moins créatif

Les travailleurs en proie à un manque de sommeil sont plus susceptibles de s’enfermer dans la routine et de manquer d’esprit d’initiative. Moins inventif, moins innovant, difficile d’être productif si vous travaillez dans un domaine professionnel qui repose sur cette qualité.

À l’inverse, les collaborateurs bénéficiant de bonnes nuits de sommeil se montrent plus efficaces et plus innovants.

Vous êtes davantage sujet aux maladies

Le lien entre le sommeil et le système immunitaire a été établi depuis les années 1970. De nombreuses études ont montré que les personnes en déficit de sommeil sont davantage enclins à développer une maladie infectieuse ou une maladie respiratoire, car le sommeil aide à maintenir l’efficacité de la réponse immunitaire.

Une étude a démontré que des sujets ayant dormi en moyenne moins de 7 heures dans les 2 dernières semaines présentaient près de 3 fois plus de risques de développer les symptômes du rhume que ceux qui avaient dormi plus de 8 heures pendant la même période. De quoi multiplier les arrêts maladie.

Vous êtes davantage sujet aux accidents du travail

Par ailleurs, une mauvaise qualité de sommeil se traduit par une baisse de vigilance, des troubles de concentration, ce qui peut engendrer des accidents de travail.

Au Canada, la Fondation Nationale du Sommeil a montré que les employés somnolents sont 70% plus susceptibles que leurs collègues bien reposés d’être impliqués dans des accidents.

Quelques exemples de catastrophes industrielles liées au manque de sommeil des employés : l’explosion de l’usine de pesticides de Bhopal en 1984 (à 01h30), l’accident nucléaire de Tchernobyl en 1986 (à 01h23), ou le naufrage de l’Exxon Valdez en 1989 (à 00h04).

Votre état de santé général se dégrade

La fatigue finit par générer des répercussions sur la santé car le sommeil assure des fonctions métaboliques et de développement en régulant la production de plusieurs hormones dont l’hormone de croissance, le cortisol l’hormone du stress, l’insuline, ainsi que les hormones de l’appétit.

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Ainsi, problèmes de poids, de tension, mauvais état de santé global sont le prix à payer pour le manque de sommeil, sans parler des conséquences financières pour les employeurs liés aux absences.

Le coût du manque de sommeil

On l’a vu, des salariés souffrant de troubles du sommeil ou ne dormant pas suffisamment ne sont pas seulement moins productifs. Ils sont également deux fois plus susceptibles d’être absents du travail que leurs collègues qui dorment de manière optimale. En conséquence, la fatigue au travail coûte cher aux entreprises.

Inquiétant, quand on sait qu’en France, 45% des 25-45 ans considèrent dormir moins que ce dont ils auraient besoin, et qu’un tiers des Français déclare souffrir d’un trouble du sommeil.

D’ailleurs, on estime qu’en France cela entrainerait en moyenne 8 jours d’absences par an, et que l’employeur supporterait 88 % des coûts indirects de l’insomnie soit 233€ par an et par salarié .

En Australie, une étude menée par des chercheurs de The University of Western Australia, chiffre la perte de productivité liée au manque de sommeil des travailleurs australiens à 12,19 milliards de dollars.

Au Canada, des études ont montré que les employés souffrant d’insomnie sont 2,5 fois plus susceptibles d’être en situation d’invalidité, et prennent 3 fois plus de jours d’absence que les bons dormeurs. En outre, leur vigilance et leur concentration chutent, ce qui accroit le risque d’accident du travail.

Des recommandations pour bien dormir

« Ce n’est pas une petite chose que de savoir dormir : il faut commencer par veiller tout le jour. »

Friedrich Nietzsche
Chaton qui dort profondément

Des horaires de coucher et de lever réguliers 

Ecoutez-vous ! Soyez à l’affût des signaux que votre corps vous envoie : bâillements, yeux qui piquent ou qui grattent, les paupières lourdes… Dès que le train du sommeil passe, et il arrive sensiblement à la même heure chaque soir, vous devez monter dans le wagon. C’est votre horloge biologique qui vous le réclame… Et c’est à ce moment-là qu’il vous faudra aller vous coucher. Ne tardez pas trop, sinon vous allez manquer votre cycle du sommeil, et il faudra attendre le suivant pour vous endormir. Pour faciliter votre sommeil et ainsi être plus productif en journée, il est donc recommandé de vous coucher et de vous lever tous les jours à la même heure ! ⏰

Une activité physique quotidienne et régulière

Car si vous ne ressentez aucun signe de fatigue avant minuit, il faudra fatiguer votre corps, en pratiquant une activité physique quotidienne. Mais évitez toutefois de pratiquer cette séance de sport deux heures avant d’aller vous coucher, sous peine de retarder davantage votre endormissement. En effet, après 19 h, la température du corps s’abaisse et la vigilance diminue. Votre organisme se prépare tout doucement à aller se coucher. De plus, cette activité physique en journée vous permettra d’évacuer votre stress et de ressentir une bonne fatigue en soirée.

« La durée de sommeil nécessaire à chacun est d’environ cinq minutes… de plus. »

 Max Kauffman

Une durée de sommeil adaptée

Vous le savez, nous ne sommes pas tous égaux en ce qui concerne la durée du sommeil. Certaines personnes vous diront qu’elles ont besoin de 10 heures de sommeil pour être en forme. Tandis que d’autres semblent se satisfaire de 5 heures. 6 ou 9 h, vous êtes le seul à connaitre réellement votre besoin de sommeil. D’autant que l’environnement et le rythme de vie (les contraintes professionnelles et familiales notamment) peuvent réduire cette durée idéale. L’important, c’est d’apprendre à écouter son horloge biologique et d’aller se coucher dès que les premiers signes de fatigue apparaissent. 😴 Vous serez également moins sujet aux réveils nocturnes.

“En Provence, le soleil se lève deux fois, le matin et après la sieste.”

Yvan Audouard

Une sieste si besoin

Puisque vous connaissez désormais les bienfaits du sommeil sur la productivité, vous pourriez penser que la sieste au travail est une bonne idée. Et vous avez raison !

Mais attention ! Il y a sieste, et sieste. Pour être efficace, la sieste doit être réalisée entre 13 h et 15 h, uniquement si vos journées vous fatiguent physiquement et ne pas dépasser 20 minutes. Au-delà, vous entreriez en phase de sommeil profond. Et si vous vous réveillez durant cette phase, vous aurez alors l’impression d’être encore plus fatigué ! C’est ce que l’on appelle le phénomène de l’inertie du sommeil, plus largement connu sous l’appellation « syndrome de la tête dans le c.l » ! 😉Et dans cet état léthargique, il vous sera plus difficile de retrouver votre concentration. Votre productivité en sera affectée le temps de retrouver vos esprits.

Les bienfaits de la sieste au travail (20 minutes maximum) ont été plusieurs fois démontrés. La sieste :

  • améliore les performances, la concentration et la vigilance ;
  • facilite la mémorisation ;
  • réduit le stress ;
  • redonne de l’énergie pour finir efficacement la journée.

Un sommeil profond optimal

Nous avons vu que lors du cycle de sommeil lent profond, notre cerveau se purifie et régénère ses cellules. Il est donc important d’optimiser la qualité de cette phase en veillant à se procurer un environnement propice au sommeil.

Une literie de qualité

Votre confort est directement lié à la qualité de votre sommeil. Pour avoir un sommeil réparateur, il faut éviter de bouger toute la nuit sur une literie inconfortable. Tant qu’à passer un tiers de notre vie à dormir, autant investir !

Une température comprise entre 18 et 19°C

Le sommeil profond est directement lié à une baisse de notre température corporelle. Evitez de surchauffer votre chambre à coucher.

Dans l’obscurité

La baisse de luminosité naturelle indique à votre cerveau qu’il est temps d’aller dormir. En soirée, tamisez les lumières pour ne pas perturber votre horloge biologique. Volets, rideaux opaques et masque de sommeil seront des signaux envoyés à votre cerveau pour plonger dans le sommeil profond.

Loin de toutes les nuisances sonores

Le bruit est l’une des principales causes des réveils nocturnes, conscients ou inconscients, suivis par d’éventuelles difficultés d’endormissement. Les conséquences d’une exposition prolongée au bruit en journée sont tout aussi néfastes : insomnie, maladies cardiovasculaires (hypertension) et troubles psychiques (stress, dépression, anxiété).

 Une décoration minimaliste

Il est difficile de bien travailler sur un bureau mal rangé. La chambre ne fait pas exception et il convient de ne pas l’encombrer. Evitez d’y installer votre bureau, une télé ou une bibliothèque. Toutefois décoration épurée ne veut pas dire froide. Pour vos murs, choisissez des teintes douces, pastels, apaisantes : le bleu, le rose, le beige, le blanc cassé, le gris ou l’écru trouveront leur place pour créer une ambiance sereine, qui invite au repos. Evitez les couleurs trop vives, telles que le rouge, l’orange ou le jaune, qui énervent plus qu’elles ne détendent.

 Sans écran

Le rythme veille – sommeil est régulé par l’horloge biologique circadienne, sensible à la lumière. Il est donc essentiel de s’éloigner de tout écran au moins deux heures avant le coucher. Car, non seulement les écrans retiennent notre attention, et retardent par conséquent l’endormissement. Mais aussi, à travers leur lumière bleue, ils envoient au cerveau un signal, qui lui fait croire qu’il fait jour, alors qu’il devrait se préparer au coucher. Ce qui dérègle le rythme circadien et le cycle du sommeil.

Femme qui travaille sur son ordinateur dans son lit le soir

Conclusion

Le sommeil est souvent vu comme une perte de temps et de productivité. Nous voyons désormais qu’il n’en est rien. Il est en réalité essentiel à nos fonctions cognitives, émotionnelles et créatives.

Bien dormir permet de recharger ses batteries pour la journée suivante et de rester performant. Une bonne nuit de sommeil améliore notre compréhension, notre concentration, nos prises de décision, notre mémoire et enfin notre créativité.

De plus des collaborateurs souffrant de troubles du sommeil ou ne dormant pas suffisamment ne sont pas seulement moins productifs. A terme c’est leur état de santé général qui est impacté.

Les entreprises ont donc tout intérêt à aider leurs employés à améliorer leur sommeil, par conséquent leur productivité globale, et ainsi réduire les coûts liés à l’absentéisme.

D’autant que le sommeil est une ressource gratuite !

J’attends vos commentaires sur votre rapport au sommeil et à son impact sur votre travail. N’hésitez pas à partagez vos tips pour un sommeil de qualité.

Faites moi part de vos suggestions quant aux prochains thèmes que vous souhaiteriez voir abordés.

Je vous dis à la semaine prochaine pour un nouveau sujet d’ergonomie.

Pour aller plus loin 

INSV : Institut National du Sommeil et de la Vigilance

INSERM : Institut National de la Santé et de la REcherche Médicale

Si vous avez aimé l'article, vous êtes libre de le partager ! ;-)

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4 Responses

  1. Merci pour tous ces bons conseils pour prendre soin de son sommeil plutôt que de « lutter » contre le sommeil 😉 C’est vrai que je suis moins productive, moins créative si je suis trop fatiguée. Pas d’écran, une température optimale, une pièce calme, tous ces conseils sont finalement plein de bon sens mais ça fait du bien de se les remémorer.

  2. Merci pour cet article qui nous démontre une fois de plus, l’importance sous-estimée du sommeil. En tant que pratiquant de musculation, je j’essai d’y accorder une grande importance (ce n’est pas toujours facile car j’ai tendance à travailler sur d’autres projets le soir) car c’est une des phases de réparation musculaire importante après l’effort. Tous ces petits rappels ne font pas de mal, bien au contraire ^^

    • Merci pour ton commentaire Rudy. En tant que sportif, tu n’ignores pas que le sommeil c’est comme l’alimentation, la respiration ou l’activité physique : il faut parfois un peu de discipline pour bénéficier de tous ses bienfaits. 😉

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Mélanie Brout - Ergonome
Mélanie Brout